
Jean-Michel BOUAT
Vice-président du grand albigeois en charge de la mobilité, du PDU, des transports urbains et des parcs de stationnement
Albi joue la carte du pragmatisme
Mobily-Cités : Quelles sont les particularités du territoire du Grand Albigeois ?
Jean-Michel Bouat : Nous sommes confrontés à des problématiques de bassin de vie. En effet, nous sommes à une heure de Toulouse : nous estimons que chaque jour 10 000 voitures sortent de l’agglomération dont une partie en direction de la capitale ré- gionale. Nous sommes donc un "pôle d’équilibre" comme d’autres villes dites "de taille moyenne" situées à proximité de la Métropole. C’est notamment le cas avec notre offre d’enseignement supérieur. Albi a ainsi la particularité de compter 6 200 étudiants qui de fait ne vont pas faire leurs études ailleurs... C’est également une ville touristique avec 1,2 million de visiteurs par an, en particulier l’été. Nous devons donc aussi pouvoir accueillir cette mobilité estivale dans les meilleures conditions possibles.
LibéA incarne désormais l’offre globale de mobilité de l’Agglo. Quelles sont les principales nouveautés qui ont accompagné le changement de nom du réseau ?
Nous lançons à la rentrée un site web dédié ainsi qu’une appli mobile classique qui permettra notamment de charger les abonnements et d’acheter des tickets. Nous avons également révisé et simplifié notre offre tarifaire et nous allons installer la vidéo surveillance dans les bus - 150 000 euros pour équiper les 37 véhicules du parc. Enfin, nous avons reconfiguré l’offre de transport à la de- mande en concertation avec les communes, les conducteurs et les usagers, car aujourd’hui le TAD est sous-utilisé.
Quelle est la stratégie de l’agglo pour améliorer l’attractivité du TAD ?
Nous allons lancer des réservations à l’heure contre 24 heures auparavant. Pour cela, nous lançons un logiciel de réservation qui va nous permettre de planifier la demande. Nous espérons ainsi multi- plier par trois la demande pour ce service. Nous ciblons sept communes représentant quatre bassins de vie qui n’ont pas de lignes régulières. En revanche, s’agissant de la commune de Marssac qui est éloignée du centre-ville d’Albi, nous avons fait le choix en cette rentrée de supprimer la ligne de bus et d’ouvrir les cars scolaires aux adultes, sachant que des cars liO de la Région Occitanie permettent aussi de rejoindre Albi puisque la loi d’orientation des mo- bilités autorise désormais le cabotage...
Comment le Grand Albigeois prépare la transition énergétique ?
Nous avons actuellement un parc de bus hybrides Euro VI avec une moyenne d’âge de sept ans. Comme le territoire de l’agglo est dense et peu étendue, notre objectif est de convertir à terme l’en- semble de notre flotte à l’électrique. Nous avons prévu d’équiper en priorité les lignes qui ont vocation à passer dans l’hyper-centre. Par ailleurs, nous attendons le résultat de l’appel à projets de la ré- gion Occitanie pour la création de stations hydrogènes. En effet, la Région a commandé à Safra le rétrofit de 15 cars du réseau tarnais dans le cadre du projet Corridor H2, ce qui impliquera la création à Albi d’une station hydrogène. Dans ce cadre, nous comptons expé- rimenter sur notre réseau deux bus à hydrogène.
L’agglomération a lancé la révision de son schéma directeur cyclable. Quelles sont les grandes orientations ?
Nous avons travaillé sur ce plan en mode participatif avec des as- sociations de promotion du vélo. Parmi les orientations du schéma : sécuriser et réaliser les aménagements existants, créer un réseau magistral et développer des liaisons à l'échelle de chaque com- mune. Nous finalisons la programmation des aménagements à ré- aliser pour les six prochaines années. Par ailleurs, nous poussons des solutions pragmatiques comme la création de double-sens cyclables, l’installation sur la voie publique de consignes à vélos payantes pour les résidents qui ne disposent pas de local à vélos, mais aussi la création d’une première station de gonflage de pneus qui sera installée dans la cour de la mairie d’Albi.
Quelles sont les autres actions ponctuelles menées en faveur du vélo ?
Nous implantons des arceaux démontables afin de nous adapter à la demande : l’été, nous avons, par exemple, moins besoin de ces équipements à proximité de l’université et davantage près de la cathédrale pour les touristes. Nous avons également mis en place un service de prêt gratuit de VAE et vélos cargos pendant deux mois pour inciter les habitants à essayer. Une aide de 250 euros à l’ac- quisition d’un vélo auprès d’un commerçant de l’agglomération complète ce dispositif : nous avons calculé que cela a permis de générer 1,2 million euros d’achats de vélos après une année de lancement. Cela fait maintenant près de dix ans que l’Agglomération investit dans les déplacements actifs. Un effort payant puisque la part modale du vélo dans les déplacements domicile-travail atteint 8-10%.
Le Grand Albigeois va également de réviser son offre de stationne- ment de surface en janvier prochain...
Comme dans les autres villes moyennes, notre défi est de réduire l’utilisation des moyens de transport carbonés. L’idée est d’utiliser le stationnement comme un levier pour inciter les automobilistes au re- port modal.... Dans cet esprit, nous réfléchissons à étendre les zones payantes, y compris pour le résidentiel avec une offre à 15 euros par mois. Parallèlement, nous allons rendre gratuit les 30 ou 40 premières minutes de stationnement partout sur toute la ville pour faciliter l’accès aux commerces. Cette offre remplacera l’offre de deux heures gratuites le samedi dans les parkings privés en ouvrage.
Autre levier de report modal, les parking-relais (P+R). Il est notamment prévu dans le PDU de créer deux nouveaux sites...
En effet, l’un est situé proximité de la zone économique Eco2Rieu- mas à l’entrée Ouest de l’Agglomération. L’autre sera situé à l’entrée nord d’Albi à Gaillaguès pour les automobilistes en provenance de Rodez. Ces P+R comportent des aires de covoiturage et des par- kings vélos sécurisés. Nous en profitons pour créer des parkings zéro énergie avec le concours de sociétés tarnaises : par exemple, le revêtement du sol mis au point par la société STPR capte la lumière du jour pour la restituer le soir. L’éclairage est complété par des candélabres solaires de la société Amarenco. Enfin, nous avons prévu à la rentrée 2022 de mettre en circulation des navettes électriques pour desservir les parkings gratuits de proximité.
L’Agglomération a fait le choix de créer des passerelles piétonnes et cyclables pour enjamber la rivière Tarn
au lieu de créer un quatrième pont pour les automobilistes...
Nous nous efforçons d’être pragmatiques... Il a été proposé dans le cadre de la révision du schéma cyclable d’étudier la réalisation de deux passerelles afin de faire des jonctions inter-agglo à l’Ouest d’Albi à Terssac et à l’Est à Lescure d’Albigeois. Par ailleurs, la pré- cédente mandature avait engagé la création d’une passerelle au centre-ville d’Albi arrimée au pont SNCF. La cité épiscopale étant classée au patrimoine de l’Unesco, il n’y avait pas de possibilité d’implanter cette passerelle ailleurs. Les travaux devraient être achevés d’ici à deux ans.
Que devient le projet de pôle d’échanges multimodal à la gare SNCF d’Albi-ville ?
Cela fait plus de dix ans que ce projet est dans les cartons, mais nous ne parvenons pas à trouver d’accord avec la SNCF pour récu- pérer de l’emprise foncière. Nous avons besoin d’espaces pour le stationnement des bus et des cars, mais aussi pour la création de parkings de reports, d’ateliers vélos... En attendant, nous rachetons des terrains à proximité et projetons de reconfigurer la cour de la gare. Si nous ne parvenons pas à réaliser ce pôle d’échanges à cet endroit, nous irons peut-être en construire un à la rocade pour accueillir les cars liO, les bus LibéA et les voitures...